Polémique sur le dépistage de la trisomie

Publié le par USD CGT 46

C’est une petite phrase de six mots. Mais elle chamboule la philosophie du dépistage prénatal en France. Jusque-là, l’article 9 de la loi de bioéthique prévoit que les examens biologiques et échographiques permettant d’évaluer le risque que l’embryon ou le fœtus soit porteur par exemple d’une trisomie 21 sont « proposés à toute femme enceinte au cours d’une consultation médicale ».

Or, le texte modifié tel qu’il a été voté par les députés le 15 février ajoute « lorsque les conditions médicales le nécessitent ». Cet amendement défendu par le député UMP Jean Léonetti est d’ailleurs « passé » contre l’avis du ministre de la Santé, .

 

En clair, jusqu’à présent, toute femme enceinte se voit proposer par son gynécologue, vers trois mois de grossesse, une prise de sang non obligatoire mais remboursée afin d’évaluer le risque que son futur enfant soit porteur d’une anomalie chromosomique, notamment la trisomie 21. Sachant que les résultats de ce dosage hormonal sont couplés avec d’autres facteurs (épaisseur de la nuque, âge de la mère) pour décider si l’on propose ou non un prélèvement (biopsie, amniocentèse) pour vérifier que le fœtus est indemne d’anomalies chromosomiques.

Le projet de loi, qui est déjà passé à l’Assemblée, est sur le point d’arriver au Sénat. Et si les sénateurs votent l’amendement, les femmes enceintes pourraient n’avoir accès au dépistage que si le médecin le juge nécessaire. Scandalisées, les sociétés savantes de gynécologie et d’échographie — notamment la Fédération des collèges de gynécologie médicale, le Collège français d’échographie fœtale, le Collège national des gynécologues et des obstétriciens français (CNGOF), le Collège national des sages-femmes, la Société française de gynécologie — ont cosigné un appel pour dénoncer un amendement qu’elles jugent « contraire aux droits du patient ».

« L’idée de certains députés, au nom de convictions idéologiques et religieuses, est de dire que ce n’est pas la peine d’informer une femme de 20 ans sur les risques de trisomie 21 », réagit le docteur Nicolas Fries, président du Collège français d’échographie fœtale. « Or, 70% des enfants trisomiques naissent de mères de moins de 38 ans, tout simplement parce que, statistiquement, il y a beaucoup plus de femmes enceintes de moins de 38 ans. »

Il ajoute : « Si la loi passe en l’état au Sénat, il y aura une vraie inégalité d’information des femmes en fonction du médecin sur qui elles tombent. Certaines sauront que le dépistage existe, d’autres non. Le médecin deviendra le seul juge, et c’est très dangereux! »

« C’est la base du devoir du médecin d’informer toutes ses patientes », estime Joëlle Belaisch-Allart, chef du service de gynécologie et d’obstétrique de l’hôpital de Sèvres et vice-présidente du CNGOF et de la Société française de gynécologie. « En filigrane, je crains qu’il y ait derrière cela une volonté de freiner ce dépistage. Or, c’est aux patientes et à elles seules de choisir si elles veulent ce dépistage, et si elles veulent ou non interrompre leur grossesse en cas d’anomalie chromosomique. » La gynécologue, qui doit être auditionnée devant une commission du Sénat aujourd’hui même, rappelle que « nous sommes dans un Etat laïc. Toutes les religions sont respectables, mais il ne faut pas qu’elles interfèrent avec la santé, la médecine ».

 

http://www.leparisien.fr/laparisienne/sante/polemique-sur-le-depistage-de-la-trisomie-08-03-2011-1348251.php

Publié dans Revue de presse

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